La fibre optique, nouveau levier de l'économie numérique

En plein boom numérique, la France peut-elle se permettre de prendre du retard dans le très haut débit ? Bien que technique, cette question mérite d'être posée alors que la France a fait de l'économie numérique un secteur hautement stratégique dans le cadre de ses Investissements d'avenir.
L'économie numérique, c'est bien sûr une capacité à innover et à penser les usages et services numériques de demain. Mais l'économie numérique suppose aussi et surtout une infrastructure capable de soutenir ces nouveaux usages et services numériques. Dans ce contexte, le très haut débit (THD) sous la forme de la fibre optique est un impératif alors que l'ADSL révèle ses premières faiblesses en terme de débit.
Dans le cadre de ses investissements d'avenir, l'État français a prévu 4,25 milliards d'euros pour le "développement de l'économie numérique", dont 2 milliards d'euros pour les "réseaux THD". L'objectif est de "stimuler l’investissement des exploitants de réseaux en dehors des zones très denses" et de "soutenir les projets d'aménagement numérique des collectivités territoriales".
En effet, la fibre optique doit être considérée comme l'un des fondements de l'économie numérique de demain. Le développement de nouveaux usages et services numériques va se traduire par une demande croissante en débit. On estime que le volume de données transitant dans les réseaux va être multiplié par cinq dans les quatre prochaines années.
En une seule connexion pourront être cumulés plusieurs terminaux (ordinateur fixe ou portable, télévision, smartphone, tablette) et plusieurs services : Internet avec diffusion WiFi, télévision HD (avec des fonctionnalités telles que la 3D, la multi-diffusion de programmes en temps réel ou la télévision sociale), la visioconférence, les jeux en ligne ou la téléphonie illimitée.
Seuls ou cumulés, ces services nécessitent des débits supérieurs aux capacités de l'ADSL. Au niveau des contenus par exemple, c'est la vidéo qui devrait enregistrer la plus forte progression. Le streaming et la vidéo à la demande (Video On Demand) devraient ainsi représenter 60% de la consommation Internet des foyers. Parallèlement, on s'attend à une forte progression des services Internet. Du Cloud Computing aux e-services, le volume de données transitant par Internet va considérablement progresser.
On comprend donc que l'ADSL sera très prochainement dépassé. Rater le virage de la fibre optique et du très haut débit reviendrait à briser la dynamique de développement et d'adoption de nouveaux usages et services numériques, dont on connait pourtant l'effet en terme de croissance et d'emploi.
Malheureusement, trop d'opérateurs continuent à survaloriser l'ADSL. Pour ces derniers, le déploiement de la fibre optique peut attendre. Ainsi pour l'Institut de l'audiovisuel et des télécoms en Europe (Idate), la France prend du retard dans le développement des infrastructures très haut débit. L'Idate, qui a réalisé une étude pour le Centre d'analyse stratégique, montre que la France ne comptait que 655 000 foyers abonnés à la fibre optique fin 2011, soit 2% des abonnements à Internet. Or 5,9 millions de foyers sont pourtant raccordables.
Seul Numericable sort du lot des opérateurs en faisant de la fibre optique un levier de croissance sur le long terme. En décembre 2011, 39 % des abonnés Numericable était sous fibre optique (368 000 abonnés), ce qui représente le meilleur taux de conversion en France. Dans le même temps, Orange et SFR affichaient un taux de 1 % (95 000 et 51 000 clients) et Free un taux de 0,6 % (28 000).
Numericable, qui a récemment annoncé avoir dépassé les 500 000 abonnés
à la fibre optique, se fixe l'objectif de raccorder 6 millions de foyers d'ici 2014 tout en maintenant le cap d'un fort taux de conversion. Vecteur de cette orientation, la nouvelle Box de l'opérateur qui propose un débit pouvant atteindre 200 Mégas, quand l'ADSL peut atteindre un maximum de 15 Mégas.
Manquer le train de la fibre optique serait donc une erreur stratégique pour le développement de l'économie numérique. Comme le Minitel hier qui avait retardé l'adoption d'Internet en France, la volonté de plusieurs opérateurs de rester dans l'ADSL nous dirige tout droit vers de sérieuses déconvenues économiques. L'ADSL marche certes très bien avec les usages numériques qui sont actuellement les nôtres, mais c'est bien la fibre optique qui reste le nouveau levier de l'économie numérique de demain.

[Source : Journal du net]

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